Immersion
La chimiothérapie terminée, le jour de la transfusion arrive enfin. Étape cruciale et très délicate où le patient, sous haute surveillance, se voit réinjecter ses propres cellules. Elle sera suivie par une phase où les lymphocytes seront encore stimulés dans le corps du patient. Le Dr Lionel Trueb, médecin associé dans l’unité d’hospitalisation dédiée à ces traitements, nous livre ses explications.
La poche des cellules à transfuser qui contient les millions de lymphocytes n’est pas plus impressionnante qu’une autre, le geste technique non plus – l’équipe soignante le maitrise parfaitement. Cependant, toutes et tous savent que cette journée sera particulière.
«Cette étape représente la quintessence du traitement, un moment chargé d’espoirs. Certaines ou certains pourraient y voir une forme de magie. Mais médicalement, il s’agit de la transfusion d’un produit cellulaire par voie intraveineuse, dans le cadre d’un protocole de recherche. Tout cela est très cadré»
décrit Lionel Trueb.
La durée de la transfusion est d’environ 30 minutes et le patient est surveillé en permanence pendant les heures qui suivent. «En général, cela se passe bien, mais nous ne sommes jamais à l’abri d’effets secondaires qui peuvent survenir, avertit le Dr Trueb. L’équipe médico-infirmière de l’unité est formée pour les reconnaitre rapidement et réagir en conséquence si cela devait être nécessaire».
Lors de leur arrivée dans la circulation sanguine, les lymphocytes vont avoir tendance à stagner au niveau des poumons, dans les heures qui suivent la transfusion. Il arrive que le patient ait besoin d’un peu d’oxygène pour l’aider à respirer.
Dans les heures qui suivent la transfusion, les lymphocytes vont être stimulés grâce à de l’interleukine-2 (IL2), administrée au patient par voie veineuse. L’IL2 est une cytokine, une petite molécule qui permet aux cellules immunitaires de communiquer entre elles. L’IL2 stimule les lymphocytes qui ont été réinfusés pour les inciter à agir au bon endroit, en plus de continuer à les faire se multiplier.
C’est dans l’heure qui suit la première stimulation qu’apparaissent les effets secondaires les plus impressionnants. Le patient ressent en général des symptômes similaires à un état grippal, avec le plus souvent des frissons et de la fièvre. L’équipe médico-soignante met tout en œuvre pour limiter la durée de ces symptômes, désagréables pour le patient. Une fois que le patient va mieux, une nouvelle injection d’IL2 est effectuée. Cette étape sera répétée autant de fois que le patient le tolère… Avant chaque nouvelle dose une réévaluation clinique complète du patient est effectuée afin de s’assurer que le patient puisse la tolérer.
L’IL2 augmente la perméabilité des capillaires sanguins, pour favoriser l’arrivée des lymphocytes dans les tissus. Cela va aussi entrainer la formation d’œdèmes et parfois d’épanchements, un autre effet secondaire inévitable. Le patient va donc prendre du poids, son volume sanguin va diminuer et sa fréquence cardiaque augmenter. Un état qui nécessite, comme à beaucoup de moments du traitement, une surveillance rapprochée assurée par un dispositif de suivi en continu.
«Dans une médecine hyper spécialisée, il nous semble capital de garder à l’esprit l’importance du contact humain.»
«Nous avons décloisonné le travail des équipes infirmières et médicales au maximum pour créer une atmosphère optimale pour le patient. Dans le cadre d’une prise en charge pluridisciplinaire, avoir une vision commune, c’est essentiel pour la sécurité et le bien-être du patient» ajoute Lionel Trueb.
Texte: Amélie Kittel