Thèse sous la direction de Francesco Panese, SSP-UNIL et IHM-CHUV/UNIL
Faculté des sciences sociales et politiques, UNIL
Depuis quelques années, on assiste au développement rapide d'apps et autres dispositifs dotés de capteurs connectables qui permettent aux individus de quantifier, d'analyser et éventuellement de partager différents aspects de leur vie quotidienne. Ces « mises en nombre » (Desrosières 2008) de pratiques ordinaires passent par des calculs algorithmiques informatisés qui contribuent à façonner le rapport des individus à « leurs » données, mais également à ce qu'il convient de connaître sur soi, sur les autres, sur le monde (Gillespie 2014; Cardon 2015).
Plus récemment, un nouveau secteur s'est développé, celui des technologies numériques embarquées de suivi des cycles menstruels et des règles. Ces outils s'adressent à des femmes qui souhaitent tomber enceintes, éviter une grossesse, et/ou connaître leur corps et leurs cycles menstruels. Bien que les méthodes sur lesquelles ces outils reposent ne soient pas nouvelles, on peut faire l'hypothèse que leur transfert sur des supports numériques change la manière dont la fertilité est vécue et comprise, et dont les connaissances qui s'y rapportent sont façonnées, interprétées et utilisées. C'est du moins l'objet d'étude que se fixe ce projet.
A partir d'une enquête ethnographique suivant la conception, production, mise à disposition, usages et accompagnement des trackers de fertilité, il s'agit d'étudier quelles transformations des formes et contenus de connaissance leur conception et leur introduction génèrent. L'entrée par la porte de concepteurs/trices devra permettre de rendre compte des processus sociotechniques (y compris leurs aspects politiques, éthiques et sociaux) qui façonnent le développement de ces outils qui peuvent potentiellement reconfigurer le rapport des sujets à leurs corps, reproduction et sexualité.