L’opération, du chirurgien Canadien Tirone David, permet de remplacer l’aorte ascendante dans sa totalité tout en préservant la valve aortique native. Le Professeur Prêtre nous explique cette technique délicate qui présente de nombreux avantages.
Qu’est ce que la valve aortique ascendante, et pourquoi doit-on parfois la remplacer?
L’aorte est la grande artère de l’organisme, celle qui reçoit le sang éjecté par chaque contraction cardiaque et le distribue dans le corps entier. Ses premiers centimètres sont ainsi soumis à un stress continuel. Avec l’âge, il n’est pas étonnant de voir ce segment se dilater chez certains patients. A partir d’un certain diamètre, cette dilatation peut conduire à une dissection, c’est-à-dire une rupture partielle ou complète de la paroi aortique. Il s’agit de complications redoutables qui présente un risque de mortalité important. Le remplacement du segment dilaté de l’aorte par une prothèse (tube prothétique) est une intervention préventive qui permet d’éviter ces déchirures. La valve aortique est très entremêlée dans le 1er centimètre de l’aorte ascendante. Du coup, le remplacement complet de l’aorte ascendante nécessite aussi celui de la valve aortique. Des prothèses combinées – un tube comportant une valve – ont été conçues pour cette opération.
Quel est la particularité de la technique de remplacement développée par le chirurgien canadien Tirone David?
L’opération de Tirone David permet de remplacer l’aorte ascendante dans sa totalité tout en préservant la valve aortique native. C’est une intervention délicate étant donné la structure complexe de cette dernière. Elle doit être suturée à l’intérieur du tube prothétique, en prenant soin de maintenir l’équilibre de sa fine architecture. On observe souvent un défaut de fermeture sur cette valve lorsque celle-ci ne comporte que deux feuillets au lieu de trois et en cas de dilatation de l’aorte ascendante. Des techniques récentes permettent de remplacer l’aorte ascendante tout en réparant cette valve aortique.
Quels sont les avantages de cette intervention?
La valve aortique native n’a besoin d’ aucun traitement pour son bon fonctionnement. La préserver évite donc un certains nombres de problèmes et de complications. Les prothèses combinées mécaniques nécessitent elles, de des traitements anticoagulants à vie ainsi que des contrôles réguliers du niveau d’anticoagulation. Les prothèses combinées biologiques (à partir de valve animale) n’exigent pas une anticoagulation, mais leur durée de vie est limitée (entre 10 et 15 ans) et les ré-opérations sont techniquement difficiles.
Enfin, l’une et l’autre de ces prothèses combinées présente un risque d’infection bactérienne, une complication redoutable aux risques mortels
Quels patients peuvent en bénéficier?
Plus les patients sont jeunes, plus le bénéfice de cette opération est marqué. A partir de 65 - 70 ans les prothèses combinées biologiques présentent une survie acceptable et deviennent concurrentielles par rapport à l’opération de Tirone David. Les indications à cette intervention ont été élargies également aux valves aortiques se fermant mal, présentant une régurgitation importante de sang. Là également, la réparation et le maintien de la valve native présentent de grands avantages par rapport à un remplacement.
Quels sont les inconvénients de cette intervention?
L’opération de Tirone David est techniquement beaucoup plus difficile à réaliser qu’un remplacement classique. C’est surtout le maintien de l’architecture de la valve aortique qui est difficile à obtenir. D’elle dépend évidemment le bon fonctionnement de cette valve. Les inconvénients de cette opération sont liés à une défaillance de la réparation valvulaire, présente dans 5 à 10% des cas après 10 ans.
Depuis combien de temps, ces opération ont-elles lieu au CHUV?
L’opération de Tirone David est réalisée de manière routinière au CHUV depuis 2012. Notre équipe en réalise entre 20 et 30 chaque année.
Comment évoluent les techniques de chirurgie valvulaire?
L’évolution de la chirurgie valvulaire est marquée par deux grandes tendances. D’un côté, on trouve la réparation des valves natives, plus facile pour celle qui présentent un problème de fermeture que d’ouverture. Et de l’autre, on a l’implantation de prothèses biologiques en cheminant le long des vaisseaux pour atteindre le site valvulaire. Ces techniques, sans l’utilisation de la machine « cœur-poumons », perturbent moins l’organisme et sont donc à court terme mieux supportées. Toutefois, elles sont moins précises que les implantations chirurgicales et n’en atteignent pas les résultats à moyen et à long terme.