Les groupes de recherche des Profs. Chin B. Eap et Martin Preisig (Département de psychiatrie, CHUV-UNIL), du Prof. Bogdan Draganski (LREN-CRN, Neurologie, Département des neurosciences cliniques du CHUV-UNIL) ont publié le 05.08.2022 un article dans la revue scientifique internationale Translational Psychiatry. Cette étude a été effectuée dans la population lausannoise et montre que les individus qui génétiquement ont un cytochrome CYP2C19 inactif, ont un meilleur fonctionnement psychologique, social et professionnel au cours de leur vie, comparés aux individus avec un CYP2C19 actif. L’activité réduite de ce cytochrome est également associée à un plus grand volume d’une sous-région de l’hippocampe dans le cerveau: le subiculum. Cette région est connectée par le biais de fibres de la substance blanche à des régions liées à la réponse au stress et aux émotions.
Mme Claire Grosu est doctorante en neurosciences et effectue sa thèse dans l'Unité de Pharmacogénétique et Psychopharmacologie Clinique du Centre de Neurosciences Psychiatriques (CNP) du Département de Psychiatrie (DP) du CHUV. Elle collabore depuis plusieurs années avec plusieurs services du CHUV (notamment avec le Prof. Bogdan Draganski, service de neurologie du Département des neurosciences cliniques et le Prof. Martin Preisig du DP) ainsi qu’avec d’autres centres. Elle s’intéresse particulièrement aux effets que peuvent exercer les gènes polymorphes sur le système nerveux et sur la santé mentale dans la population Lausannoise.
les métaboliseurs CYP2C19 inactifs présentent une meilleure santé mentale
La dépression est considérée comme l'une des maladies les plus invalidantes, avec plus de 264 millions de personnes touchées dans le monde. Elle représente non seulement un fardeau socio-économique majeur, mais elle est également à l'origine d'une grande souffrance des patients et de leurs proches. Tout progrès dans la compréhension non seulement de la physiopathologie, mais aussi des mécanismes de protection potentiels, est essentiel à la fois pour les cliniciens dans la pratique quotidienne et pour les chercheurs qui développent de nouvelles thérapies.
Nous nous concentrons ici sur le cytochrome P450 2C19 (CYP2C19) , membre de la superfamille P450, qui métabolise de nombreux médicaments, xénobiotiques et composés endogènes tels que les acides gras, les hormones sexuelles comme la progestérone ou les œstrogènes et les neurotransmetteurs. Le CYP2C19 est exprimé pendant le développement fœtal dans le cerveau et après la naissance dans le foie et le tractus gastro-intestinal.
Des données provenant de modèles animaux mais également chez l’être humain montrent que les métaboliseurs CYP2C19 inactifs présentent des symptômes dépressifs plus légers et un volume hippocampique plus important que les métaboliseurs actifs.
Une étude publiée dans la revue scientifique Transcriptional Psychiatry
L’étude, publiée le 5 aout 2022 dans la revue Translational Psychiatry, a été menée auprès de la population Lausannoise. L'objectif principal de la présente étude était de tester et de valider les résultats précédents concernant l'impact de l'activité enzymatique CYP2C19 sur le fonctionnement au cours de la vie et sur l'anatomie cérébral de l’hippocampe et de ses sous-régions.
Cette analyse a montré que les personnes qui, génétiquement, n’ont pas d’activité CYP2C19 ont un meilleur fonctionnement psychologique, social et professionnel au cours de leur vie, comparés aux individus avec un CYP2C19 actif. Cette étude a également permis d’associer l’activité du CYP2C19 au volume du subiculum, une sous-région de l’hippocampe dans le cerveau, connue pour être impliquée dans la gestion du stress et des émotions. Les personnes sans CYP2C19 présentaient un volume du subiculum droit plus important que les personnes avec un CYP2C19 actif.
Cette étude a mis en évidence dans la population lausannoise que les personnes sans CYP2C19 ont un meilleur fonctionnement au cours de la vie, une meilleure santé mentale et un volume du subiculum plus important que les personnes avec un CYP2C19 actif. Malgré que le CYP2C19 est seulement un des très nombreux facteurs pouvant influencer la santé mentale, et que son analyse ne peut être utilisé comme outil de diagnostic, ces résultats ouvrent de nombreuses pistes de recherche sur les causes des maladies psychiatriques dont la dépression.