Une mauvaise qualité ou quantité de sommeil est associée à une détérioration de la santé : problèmes d’humeur, dépression, prise de poids, infections, diabète, hypertension, etc. Un lien a notamment été établi avec le risque cardiovasculaire. Les équipes du Centre d’investigation et de recherche sur le sommeil et du Service de médecine interne du CHUV, en collaboration avec le Centre de recherche cardiovasculaire de Paris de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) se sont penchées sur cette réalité. Pour cela, elles ont étudié le risque d’accidents cardiovasculaires (syndrome coronaire aigu ou accident vasculaire cérébral) en lien avec cinq composantes du sommeil : la durée de sommeil chaque nuit, le chronotype (être du matin ou du soir), la fréquence des insomnies, la somnolence diurne excessive et les apnées du sommeil.
« Cette étude est unique car elle tient compte de cinq dimensions du sommeil et pas uniquement de sa durée ou des apnées, constate le Pr Raphaël Heinzer, chef du Centre d’investigation et de recherche sur le sommeil du CHUV. Travailler sur certaines des composantes de notre sommeil peut avoir un impact direct sur notre santé. »
Les scientifiques ont intégré ces cinq composantes dans un score unique, évalué grâce à un questionnaire. Il varie de 0 (plus mauvais score) à 5 (score optimal correspondant à 7 à 8 heures de sommeil par nuit, être du matin, ne pas avoir d’insomnies, d’apnées ni de somnolence excessive en journée).
Un suivi de plus de 15'000 personnes pendant près de 10 ans
Ce score a été utilisé dans deux enquêtes de population destinées à étudier les déterminants de la santé cardiovasculaire. L’une a été menée au CHUV via l’étude HypnoLaus de la cohorte CoLaus|PsyCoLaus, cohorte impliquant 6'733 participant-e-s. L’autre a été menée à Paris et a inclus 10’157 adultes de 50 à 75 ans (Étude prospective parisienne n° 3, EPP3).
Le score a été calculé chez les participant-e-s au moment de leur entrée dans l’étude puis deux à cinq ans plus tard. La survenue d’évènements cardiovasculaires a ensuite été surveillée pendant 8 à 10 ans environ. En combinant les données des deux enquêtes suisse et française, cette analyse confirme que plus le score initial est élevé – et donc que la qualité du sommeil est bonne – plus le risque d’accident cardiovasculaire est faible. Les personnes ayant un sommeil optimal avec un score de 5 (10% des participant-e-s) ont un risque de pathologies cardiovasculaires réduit de 63 % par rapport aux personnes ayant un score de 0 à 1 (9% des participant-e-s).
« Ces résultats nous incitent à prendre soin de notre sommeil, de la même manière que l’on prend soin de son corps, conclut le Pr Pedro Marques-Vidal du Service de médecine interne du CHUV. On associe trop souvent un sommeil court avec une forte productivité alors qu’une personne qui dort bien va diminuer son stress et baisser ses facteurs de risque cardiovasculaire. »